Histoire de Saumur
De l’enceinte médiévale à son front de Loire majestueux, la ville de Saumur a su s’ouvrir au fil des siècles. 64 monuments historiques rappellent que Saumur fut une cité médiévale, une résidence princière, un bastion de la réforme protestante et aujourd’hui le centre névralgique de l’équitation française.
Saumur est une agglomération relativement récente, dont la fondation au Xe siècle de notre ère, est liée initialement à une implantation religieuse. Les moines de la prestigieuse abbaye de Saint-Florent, installée initialement au Mont-Glonne, recherchent un site pour se mettre à l’abri des invasions normandes.
Leur choix s’oriente sur l’éperon calcaire du coteau de Saumur. Le château sera construit peu après, par Thibault de Blois, pour protéger l’abbaye.
L’essor économique et démographique du XIIe siècle profite largement à Saumur, dont les quartiers croissent dorénavant régulièrement.
Suite à la prise de Saumur par Philippe Auguste en 1203, une courtine de plan quadrangulaire, pourvue de tours rondes à chaque angle, est élevée autour du donjon roman. Partiellement conservée, elle forme les bases de l’actuel château.
L’âge d’or des ducs d’Anjou
Le déclenchement de la guerre de Cent Ans en 1337 donne aux villes fortifiées de Saumur et d’Angers un rôle stratégique capital. Alors que Louis Ier entreprend une importante reconstruction du château, lui donnant l’élégante silhouette représentée sur la miniature des Très Riches Heures du duc de Berry, la ville se pare d’une importante enceinte fortifiée, dont le chantier, attesté en 1364, se poursuit jusqu’au milieu du XV e siècle. De loin la plus spectaculaire, elle se composait de quatre portes et d’au moins 19 tours, dont 10 d’entre elles subsistent encore aujourd’hui, à l’image des spectaculaires tours Grénetière et Papegault.
Si le roi René entreprend plusieurs importantes transformations au château, le XV e siècle se caractérise davantage par l’essor des constructions privées, qui connaissent une importante phase de renouvellement. Une activité économique très diversifiée, incluant la viticulture, le textile, la boucherie ou encore le transport et le stockage de toutes sortes de marchandises, se développe grâce à la présence de nombreux ports.
Si l’on excepte la façade de l’hôtel de ville des années 1515, la première chapelle des Ardilliers, construite de 1534 à 1553 sur le sanctuaire d’une fontaine aux vertus bienfaisantes ou encore la chapelle de 1549 de l’église Saint-Pierre, peu de chantiers sont programmés durant la Renaissance.
Saumur : capitale protestante
Le 15 avril 1589, le fidèle conseiller du futur roi Henri IV, Philippe Duplessis-Mornay, est nommé gouverneur de Saumur. De confession protestante, il contribuera à faire d’une ville majoritairement catholique, l’une des capitales européennes de la Religion Prétendue Réformée. Après avoir fortifié les faubourgs de la Bilange, de Saint-Nicolas et de la Croix- Verte, il décide de doter le château d’un imposant système bastionné. La construction d’un temple de 1590 à 1592 et la création d’un collège pour l’éducation des jeunes Saumurois et d’une académie pour l’enseignement supérieur, confirment dès lors le statut de capitale protestante.
Afin de contrer l’essor de la culture protestante, la Réforme catholique entre alors dans sa phase positive, celle du magnifique essor de la spiritualité, de la controverse et de l’effervescence intellectuelle. A l’origine d’une importante expansion urbaine, une constellation d’ordres religieux encercle parallèlement la ville close : les récollets en 1603, les capucins en 1608, les oratoriens en 1614, les ursulines en 1619, les bénédictines de la Fidélité en 1627 et les visitandines en 1647. Ce processus est alors spécifiquement symbolisé par la construction exceptionnelle et simultanée de deux rotondes, Notre-Dame des Ardilliers et Sainte-Marie de la Visitation, véritables estampilles urbaines du renouveau spirituel.
Les embellissements de Saumur
L’ingénieur en chef de la Généralité de Tours, Jean-Baptiste de Voglie, dresse au milieu du XVIIIe siècle un vaste programme de modernisation. Afin de désengorger la ville close, il propose sur un plan de 1744 de déplacer l’axe de franchissement de la Loire à l’ouest. L’achèvement du pont, construit de 1756 à 1770 par l’ingénieur Louis de Cessart, marque alors le point de départ des projets d’embellissement de la zone comprise entre le fleuve et les remparts de la ville.
Les embellissements de Saumur comportent également une dimension esthétique. Projeté dès 1769, l’imposant immeuble de la rue Molière, situé sur les anciens fossés, est sans conteste l’un des exemples les plus spectaculaires de cette tendance. Cette approche esthétique se traduit également par l’ouverture de la ville sur la nature, selon un phénomène amorcé au siècle précédent. L’enceinte fortifiée disparaît alors au profit d’un front de bâtiments continu, qui aboutit, à partir de 1770, à la destruction des portes fortifiées.
L’établissement du corps royal des carabiniers dans les prairies inondables du Chardonnet, ordonné en 1763 par le ministre Choiseul, a constitué un facteur déterminant pour l’extension de la ville dans un secteur peu propice à l’urbanisation. La construction de la caserne, achevée en 1770, et celle des bâtiments constitutifs de l’activité équestre (manège, écuries, magasin à fourrage) forcent ainsi les autorités locales et militaires à assainir le quartier. L’avènement de la Restauration en 1814 est marqué à Saumur par l’installation d’une école d’instruction pour les troupes à cheval, dans les anciens bâtiments de la caserne des carabiniers. Cette institution, fermée une première fois, renaîtra quelques années plus tard, en 1825, pour devenir la célèbre école de cavalerie de Saumur. De nombreux bâtiments sont alors construits tout au long du XIXe siècle, donnant naissance à un étonnant théâtre d’architecture.
La production de vin, selon la méthode dite champenoise, débute en 1834 chez les caves Ackermann, tandis que l’entreprise patenôtrière des Mayaud impose progressivement son savoir-faire. Saint-Hilaire-Saint-Florent concentre alors la majorité des «maisons de Saumur brut», donnant naissance à un patrimoine viticole extraordinaire. L’éclairage au gaz, installé en 1841, véhicule parallèlement l’image d’une ville moderne, renforcée par la construction de la gare de l’État.
Le banquier Charles Louvet, maire de Saumur de 1844 à 1869, est incontestablement la personnalité marquante du Second Empire. Grâce à une politique d’emprunts offensive, Saumur connaît une expansion économique et industrielle sans précédent. Une vaste campagne de construction de bâtiments publics est alors amorcée, sous la houlette d’un architecte de grande envergure : Charles Joly-Leterme. Saumur se dote ensuite d’un temple protestant (1843), d’abattoirs (1855), d’un hôtel de ville (1860), d’un hôpital général (1865) et enfin d’un théâtre à l’emplacement de l’ancienne salle de spectacle (1866). Cette période contribue ainsi à faire de Saumur l’un des hauts lieux du patrimoine XIXe de la région.
Les aménagements urbains ne sont pas pour autant négligés, à l’image de la rue Dacier, percée en plein coeur de la ville dans les années 1850.
Saumur après 1945
Après les bombardements de 1940, qui touchèrent essentiellement les quartiers de la gare et des ponts, Saumur est en pleine reconstruction. L’école de cavalerie se réinstalle à Saumur en 1945 et prend le nom d’Ecole d’Application de l’Arme Blindée et de la Cavalerie (E.A.A.B.C.). Face à la pression foncière des Trente Glorieuses, le coteau se couvre rapidement d’habitations. Ces extensions sont complétées par plusieurs grands ensembles, à l’image de Millocheau en 1955, des Hauts Quartiers entre 1956 et 1965 et du Chemin Vert entre 1967 et 1976.
La richesse de ce patrimoine a été reconnue dès 1964 par la création de l’un des premiers secteurs sauvegardés de France. Le label Ville d’Art et d’histoire, qui sera attribué en 2006 par le Ministère de la culture, lui donne une nouvelle dimension.